Accueillir un élève nouvellement arrivé à l’école élémentaire

Relations de l'école avec les familles

Le développement de la relation école/familles est indispensable. Les premiers entretiens vont permettre :

  • D’accueillir l’élève et sa famille ;
  • De mettre l'élève et sa famille en confiance, d’évaluer leurs attentes ;
  • De connaître quelques éléments de l’histoire personnelle de l’élève, de son parcours migratoire ;
  • De reconstituer le parcours scolaire de l’élève : niveau de scolarisation antérieure, langue de scolarisation, élèves déjà plurilingues,... ;
  • D'observer la compréhension orale, l'expression orale, les attitudes significatives (découragement ou tentatives de prise de parole) ;
  • De susciter un désir d’école chez l’élève, de lui permettre de construire un nouveau projet d’écolier ;
  • D’informer les parents et l’élève sur le fonctionnement de l’école : livrets d’accueil en plusieurs langues (exemple d'un livret d'accueil en anglais

Quelques conseils

  • Si l'élève et ses parents sont totalement non francophones, on aura recours à un médiateur ;
  • Faire visiter l'école ; 
  • Présenter les différentes personnes de l'école (équipe éducative, intervenants extérieurs) en expliquant les rôles de chacun ;
  • Donner un emploi du temps avec les différents horaires. Cet emploi du temps sera provisoire car évolutif ;
  • Présenter les outils de liaison à la famille ; 
  • Souligner l'importance de l'assiduité à l'école, de la régularité ;
  • Présenter le matériel scolaire nécessaire et donner une liste (manuels, fournitures,...) ; 
  • Donner des repères au niveau de l'évaluation de son travail (type de notation, fréquence, livret d'évaluation,...) ;
  • Présenter les différentes aides possibles au sein de l'école mais aussi en dehors (l'accompagnement à la scolarité par exemple) ;
  • Présenter le système scolaire en vigueur en Nouvelle-Calédonie.

Principales difficultés rencontrées par un élève nouvellement arrivé

Les élèves nouvellement arrivés sont parfois confrontés à une situation particulièrement difficile : les contextes familial, social, économique et affectif se trouvent souvent déstabilisés. L’élève va devoir se construire dans une nouvelle culture, une nouvelle langue, une nouvelle école tout en s’appuyant sur sa langue et sa culture d’origine.
L’acquisition de la langue française  va lui permettre de communiquer,  de faire des apprentissages, mais aussi de s’intégrer socialement.
Les principales difficultés rencontrées :

Adaptation à l'école française
  • Isolement de l’élève en particulier dans les classes ordinaires ;
  • Des élèves qui ne s’autorisent pas à réussir ;
  • Des élèves qui refusent d’investir la langue française (projet de retour, « conflit de loyauté »,..) ;
  • Des élèves qui arrivent en cours d’année scolaire ;
  • Aspect temporaire de la scolarisation ;
  • Manque de repères temporels ;
  • Manque de repères spatiaux ;
  • Méconnaissance du fonctionnement du système éducatif français, de ses acteurs ;
  • Méconnaissance de certaines disciplines enseignées
Habitudes scolaires
  • Différences de présentation et de rigueur du travail ;
  • Incompréhension du système de notation ;
  • Utilisation d'un matériel scolaire différent ;
  • Difficultés pour entrer dans les apprentissages ;
  • Inadaptation au rythme de travail ; 
  • Absence d'aides pour les devoirs
Compréhension orale et écrite
  • Incompréhension des consignes et énoncés ;
  • Méconnaissance du vocabulaire disciplinaire ;
  • Problèmes de discrimination auditive, de perception des sons ;
  • Difficultés de compréhension ;
  • Difficultés à s'adapter à d'autres voix que celle de l'enseignant de la classe ;
  • Compréhension en lecture : code graphique équivalent ou différent ;
  • Des élèves âgés non lecteurs dans leur propre langue.
Expression orale/écrite
  • Manque de confiance en soi, peur de prendre la parole ;
  • Difficultés d'ordre syntaxique ; 
  • Difficultés d'ordre phonétique ; 
  • Difficultés d'ordre lexical ;
  • Systèmes d'écriture différents.

Évaluation initiale diagnostique

Afin de pouvoir construire de nouveaux apprentissages, il va être indispensable de prendre en compte les apprentissages antérieurs. C'est pourquoi, il est intéressant d'avoir quelques renseignements sur la scolarité de l'élève avant son arrivée en Nouvelle-Calédonie :

  • L'élève a-t-il été scolarisé ? Si oui, à quel âge ?
  • L'élève est-il lecteur dans sa langue d'origine ?
  • Quelle était la classe fréquentée l'année précédente dans son pays d'origine ou dans un autre pays ?
  • A-t-il suivi quelques cours de français ?

La question qui se pose de façon récurrente est la difficulté des enseignants à déterminer le niveau scolaire de l'élève, d'autant plus quand le mode de scolarisation dans le pays d'origine est éloigné du nôtre. Quelques praticiens ont cependant mis au point des tests spécifiques qui permettent à partir d'exercices rédigés dans toutes les langues, d'établir un barème d'équivalence dans la scolarisation antérieure.

L'évaluation en langue d'origine des acquis scolaires et l'évaluation du niveau de français oral et écrit permettent à l'équipe éducative d'organiser le parcours scolaire le plus pertinent. Dans un premier temps, l'évaluation peut se faire par l'observation de l'élève en action, en situation d'interaction avec ses pairs, notamment en ce qui concerne les compétences de communication : capacité à écouter l'autre, à réagir, désir de communiquer, envie de comprendre et de se faire comprendre.

Le CASNAV-CAREP dispose d'outils d'évaluation dans différentes langues sur :

Les compétences en français

Les capacités évaluées :

  • reconnaître un signe,
  • retrouver un son dans un mot,
  • recopier des lettres ou des phrases simples,
  • classer par ordre alphabétique,
  • reconnaître le rythme d'une phrase,
  • reconnaître le sens d'une phrase,
  • traitement des phrases lacunaires,
  • mettre la ponctuation d'un texte court,
  • conjuguer aux temps simples,
  • lire l'heure,
  • décrire une situation sur une image,
  • rédiger quelques phrases personnelles,
  • lire les chiffres, les minuscules, les majuscules d'imprimerie,
  • lire des syllabes simples ou complexes, ou des graphies à sonorités proches,
  • écrire des sons dictés.

Tests de lecture compréhension en langue d’origine (accès à la page d’accueil puis liens internet)

Les compétences en mathématiques
  • ranger des objets,
  • suite des nombres,
  • coder et décoder une quantité,
  • comparer des nombres,
  • dénombrer,…
Les compétences en graphisme / écriture
  • motricité fine,
  • discrimination visuelle,
  • orientation spatiale,
  • structuration temporelle,
  • correspondance scripte/cursive,…

 Ces évaluations vont permettre :

  • à l'enseignant de mieux comprendre le cheminement de l'élève, de mesurer son degré de familiarité avec l'écrit ;
  • à l'élève de prendre conscience de ce qu'il sait déjà faire ;
  • de construire les repères d'un projet d'apprentissage en particulier à partir des compétences scolaires construites dans la langue d'origine ;
  • de prévoir des activités adaptées aux besoins de l'élève : mise en place du projet d'aide individualisée ou PPRS ;
  • d'établir un profil des réussites et échecs de l'élève.

Les principes pédagogiques

  • Simplifier les consignes, ne pas multiplier les équivalents et les explications, utiliser des termes précis ;
  • Utiliser des supports concrets (objets, photos,…), des situations vécues de manipulation et d’expérimentation, des jeux,...
  • Prévoir tous les jours un ou deux moments spécifiques avec l’élève ;
  • Mettre en place des tutorats dans la classe ;
  • Adapter l’évaluation en fonction du travail mené (progrès réalisés, objectifs à atteindre) ;
  • Préparer un programme avec des thèmes de travail liés à la vie quotidienne : se présenter, parler de sa famille, de soi, de la maison ; se situer dans le temps, dans l’espace scolaire, exprimer ses besoins, ses manques,…
  • Préparer un programme en ciblant des objectifs précis : compréhension des consignes scolaires, du lexique, du langage mathématique, différenciation des pronoms personnels sujets, des temps des verbes,…
  • Prévoir un décloisonnement en français avec des temps de communication spécifiques.
La compétence de communication 

L'acquisition de la langue parlée est indispensable pour toute communication sociale et scolaire : actes de langage, conduites de discours.

  • Communication hors école : acquérir très rapidement la capacité à entrer en relation oralement avec les différents interlocuteurs, à comprendre les énoncés, lire les écrits,...
  • Communication à l'école : apprendre à rentrer en relation avec un certain nombre d'adultes, avec ses pairs, comprendre les consignes. Une difficulté particulière de la communication scolaire tient à la place et à l'usage de l'écrit comme vecteur d'information.
  • Méta-communication : l'élève doit être en mesure de communiquer sur ses propres pratiques langagières, de parler de la langue, de maîtriser les instruments métalinguistiques.
  • Communication spécialisée : niveau de formulation, l'objectif de l'échange est ici de construire progressivement un objet de connaissance dans les domaines disciplinaires ou un savoir-faire (capacité à reformuler pour passer à une formulation élaborée, passer de la connaissance commune à une connaissance conceptualisée).

Interdisciplinarité :

  • le français de l'énoncé ;
  • le français de la consigne ;
  • le français spécifique à la discipline ;
  • le français pour parler.

La compétence linguistique (ou compétence formelle)

 

Il va s'agir de développer des compétences linguistiques orales et écrites en réception et en production :

  • Lexique ;
  • Phonologie ;
  • Morphosyntaxe.

Les outils de la langue sont au service des activités de lecture, d'écriture et d'expression orale. Ils sont aussi au service de l'acquisition des disciplines.

Les activités favorisant les apprentissages implicites (ex : grammaire implicite, c'est-à-dire l'ensemble des règles qui permettent de produire des phrases correctes en français, spontanément acquises par une pratique régulière de la langue) et d'autres développant des phases d'explications devront alterner.

Le processus d’apprentissage se construit sur des savoirs, des savoirs-faire et des savoirs-être. Les élèves non francophones abordent l'acquisition des règles à partir de leur propre système linguistique et des descriptions qui leur ont été proposées dans leur école d'origine.

L’apprentissage d’une nouvelle langue vient superposer ces savoirs. Selon le modèle de la grammaire contrastive où les langues se ressemblent, l’élève reconnaît telles ressemblances avec sa langue maternelle et fait le transfert, c'est-à-dire qu’il reproduit dans la langue française les structures de sa langue avec des résultats soit positifs soit négatifs appelés interférences :

  • ces interférences se traduisent en confusions dues à des ressemblances ou à des dissemblances linguistiques avec la langue maternelle ;
  • elles se confondent fortement au point de devenir une importante source d’erreurs pour les apprenants.

Chercher à repérer ces erreurs, à élucider leurs sources et à suggérer des moyens en vue d’une remédiation possible s’avère être une composante essentielle de la pédagogie de l’enseignement / apprentissage.

Une insuffisante maîtrise de certains aspects du système de sa langue d'origine peut retentir défavorablement sur l'acquisition du français. Le métalangage utilisé pour le français ne recouvre pas les mêmes faits linguistiques.

Un travail d'ajustement progressif se révèle nécessaire avec la participation des élèves eux-mêmes.

Lexique : Le CASNAV de Besançon un lexique interdisciplinaire de français de scolarisation recensant les termes et les structures de base essentiels pour que l'élève nouvellement arrivé accède rapidement à tous types d'énoncés.

Syntaxe : quelques éléments pour une progression.

Phonétique progressive du français avec 600 exercices.  document établi d'après Charliac, Lucile, Motron, Annie-Claude. Paris : CLE international, 1998.

Organisation au sein de l'école

Mise en place d'une réflexion avec l'ensemble de l'équipe pédagogique concernant l'accueil de l'élève nouvellement arrivé.

  • Il y a un parcours suffisamment particulier de l'élève nouvellement arrivé pour que celui-ci soit pris en compte ;
  • A l'école, l'accueil ne sera pas seulement du ressort de l'enseignant de la classe mais celui de l'ensemble de l'équipe éducative ;
  • Par accueil, il faut entendre l'écoute que chaque membre de l'équipe éducative prêtera aux conditions d'arrivée, à l'aspect familial qui ne doit en aucun cas être exclu de la résolution des problèmes de scolarité et éventuellement à l'aspect matériel des choses. Très rapidement se poseront pour l'école les questions de cantine, de fourniture de matériel scolaire, de déplacement en bus,... L'équipe éducative ne pourra donc occulter complètement cette partie de l'accueil.

Deux principes :

  • Faciliter l'adaptation de ces jeunes au système éducatif français d'éducation en développant les aides adaptées à leur arrivée ;
  • Assurer dès que possible l'intégration dans le cursus ordinaire.

Prise en charge de l'élève dans l'école

  • Il s'agit de mettre en place une réflexion de l'ensemble de l'équipe pédagogique sur la prise en charge de l'élève et d'élaborer un projet individuel. Il reviendra à l'enseignant et à l'équipe éducative de faire le point sur les ressources humaines qui pourront aider à mettre en place un apprentissage de la langue, de se concerter régulièrement pour assurer une cohérence.
  • Toutes les ressources internes à l’école  sont mobilisées afin de mettre en place un soutien dans ces différentes disciplines. On étudiera les possibilités de prise en charge au sein des autres classes en fonction des objectifs visés.
  • Il sera nécessaire d’élaborer un emploi du temps individualisé prenant en compte les besoins de l’élève et les ressources de l’école. Cet emploi du temps sera revu périodiquement  (nécessité d’une régulation, d’ajustements progressifs).
  • Prévoir un outil de liaison entre enseignants qui suivra l’élève dans toutes ses activités.
  • Un travail en partenariat sera indispensable (liens avec les familles, les enseignants,...).
  • Pendant les premiers mois de scolarisation, les méthodes de F.L.E  (Français Langue Étrangère) peuvent être une aide utile et complémentaire mais il est parfois nécessaire de les adapter.

Mise en place d'un projet individuel

Après avoir cerné chez chaque élève ce qui est construit, ce qui est en voie de construction, il faudra définir ce qui reste à construire. Le projet de l’élève va permettre une approche pédagogique individualisée. Cette approche permettra :

  • De répondre aux besoins d’apprentissage de chaque élève, d'aider l’élève à donner du sens à ses apprentissages ;
  • A l’élève d’être un sujet actif dans la construction de ses savoirs ;
  • De mettre l'élève en confiance ;
  • De privilégier dans un premier temps certaines notions exigibles pour se rapprocher au maximum des instructions officielles (mise en œuvre de progressions cycle 1, cycle 2 voire cycle 3).

Souvent, les élèves vont avancer plus vite dans certaines matières et moins vite dans d’autres. On veillera donc à respecter les rythmes d’apprentissages de chacun et à  privilégier une progression souple qui permette une accélération  progressive des apprentissages mais également une individualisation des vitesses de progression.

Pour ce public spécifique, il convient de mettre en place dans chaque école des moments de concertation afin de pouvoir évaluer le projet de l’élève. À l’issue de la première année de scolarisation en Nouvelle-Calédonie, un suivi individualisé reste souhaitable. En cas d’orientation en sixième, une attention particulière sera apportée à cette  transition : poursuite au collège du suivi individualisé par un enseignant référent, mise en place d'un projet,...

Ce qu'il faut éviter

Quelques solutions s'imposent parfois à l'esprit lorsque l’on pare au plus pressé. Il arrive donc que des choix malencontreux prévalent à l'orientation de l'élève.
Il faut rappeler ici-même un principe de base : le fait de ne pas parler la langue ne peut être considéré ni comme un handicap, ni relever de la difficulté d’apprentissage.

Toute solution qui tendrait à inscrire, dès leur arrivée, ces élèves dans des structures spécialisées est une erreur : demande d’orientation en CLIS ou SEGPA par exemple. Il faut les scolariser dans leur classe d’âge (ou au plus près).

Grilles et exemples de projets individuels Exemples de trame
Grilles de  projet individuel en primaire (grille1grille2)

Exemples de projets individuels
Elève de 6 ans 1/2 originaire de Bosnie. À son arrivée en France, cet élève a été scolarisé en CP. Cet élève n'a jamais été scolarisé auparavant. 

Elève de 9 ans, Rom du Kosovo. Cette élève a séjourné en Allemagne puis en France. Elle a été scolarisée dans la région parisienne, dans le Bas-Rhin puis en Moselle mais de manière très irrégulière : les compétences de fin de cycle 2 ne sont pas acquises. 

 

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